mardi 23 décembre 2008

Le Chamarré Montmartre


15 décembre 2008 parisien, le ciel ne connaissait pas de couleur, le froid était humide et collant, les bonnets et écharpes paraient les passants. Le rendez-vous était fixé rue Lamarck, au 52. Le A. Beauvilliers qui attirait l’œil avec sa glycine des beaux jours avait céder la place au Chamarré-Montmartre. La plante se faisant discrète, elle laissait entrevoir la rénovation de l’établissement.

Mes amis m’attendaient, attablés, haut perchés, dans l’espace « bar » du restaurant, le côté flamboyant qui tranchait net avec la sérénité de la vaste salle aux allures marines et minérales. Le Paris gris des mois tristes, laissant les branchages désœuvrés, s’effaça subitement lorsque je pris place dans l’un des confortables sièges aux rayures de Pondichéry. Je me trouvais soudain ailleurs, déplacée, transportée sur une île.

Cette première impression n’était finalement pas le fruit du hasard car la carte se présentait comme une invitation au voyage. Les yeux plongeant dans cet appel du large, trois itinéraires se dessinaient accompagnés d’explications : « retour d’un comptoir indien : la chaleur des épices », « le genre franco-mauricien : le doux amer », et encore « mon aigre doux d’extrême Asie : la minéralité et l’acidité ». Le Chamarré-Montmartre laisse cependant place à la liberté. La balise peut se perdre dans les méandres des menus et les yeux peuvent se fermer, laissant une carte opalescente au chef des lieux, Antoine Herrah. Ce dernier s’inspire de ses origines mauriciennes et s’aide de trois cuisiniers japonais afin de créer des panoplies aromatiques harmonieuses. Le cuisinier partage les découvertes des saveurs en les brassant, les mélangeant et les assemblant dans une constante recherche d’équilibre. Ce métissage des arômes se retrouve dans chacun des plats.

Je me laissais alors entraîner par le roulis d’un service souriant et attentif, et découvrait une succession de plats s’enchaînant les uns après les autres. Les rouleaux de marlin fumé précédaient les huîtres iodées en gelée d’eau de mer et les poulpes des Seychelles cuisinés de trois façons. Puis le retour à la terre se fit avec un somptueux marbré de perdreau, foie gras et cèpes. Et, comme les vagues rapportent sur la plage les trésors de la mer, de délicats filets de maquereaux surmontés d’une tranche de fois gras furent portés à mon palais. Un lapin sauvage aux saveurs d’outre mer vint témoigner de la présence de la lande au dessus de la plage. Enfin la forêt exotique permit de garnir une tatin aux mangues et au citron vert confits.

Timothée Châtelet, le directeur de salle et sommelier se pressait d’agrémenter notre périple en remplissant nos verres de doux breuvages blancs, puis rouges avec une succession de robes se fonçant et s’amplifiant. La musique Lounge de la fin des années 70 contribuait à nous maintenir dans un état de douce quiétude que seules les aiguilles de la montre nous contraignirent à quitter.

Le Chamarré Montmartre
52 Rue Lamarck
75018 Paris
Tel: 01 42 55 05 42

Christophe Vasseur- Boulanger


Christophe Vasseur est un boulanger atypique. De ceux qui, à la croisée de plusieurs chemins, ont trouvé la sincérité et l’authenticité de leur démarche. D’ailleurs, « Du Pain et Des Idées », sa boulangerie est une véritable allégorie de ses envies, se situant en angle de rues dans le dixième arrondissement. Le choix du lieu n’est pas un hasard et reflète la personnalité du boulanger qui ne pouvait pas trouver meilleur endroit. La boulangerie date de 1889 et sa décoration de peinture sur verre et miroirs biseautés est classée aux monuments historiques. Tout comme le pain fabriqué sur place, le lieu est marqué par la tradition et l’histoire. Car Christophe Vasseur n’est pas un boulanger se contentant de fabriquer du pain… son parcours, comme son pain, a connu des méandres avant de trouver son chemin.

Après une école de commerce, Christophe Vasseur, s’est lancé dans la vie active du jeune diplômé aux horaires sans limite jusqu’au jour où, à l’aube de ses trente ans, il décide qu’il est grand temps d’en perdre un peu justement afin de ne plus le gâcher. Il troque alors son costume/ cravate et part à la recherche de l’essentiel. Ce parcours dure trois ans et demi, pendant lesquels, les idées bouillonnent, mûrissent et finissent par aboutir. Il se forme auprès d’un boulanger parisien chez qui il apprécie le contact avec la matière et le travail de la pâte. CAP en poche, il n’est plus question de se lancer dans l’industrie du pain, mais de se révéler dans l’artisanat. Il étudie les techniques anciennes, la plupart du temps abandonnées par les boulangers de nos quartiers.

Tout comme il a permis à son projet personnel de mûrir, il laisse son pain vivre, les ferments agir et la pâte se lever. Le pain est un aliment vivant qui varie en fonction des saisons, du temps, des ingrédients. Dès lors, un pain n’est jamais identique à un autre… c’est ce qu’il explique aux clients de sa boulangerie. Car Christophe Vasseur veut donner, partager son travail, son expérience, pour cela il est souvent dans la boulangerie afin d’échanger et de continuer à apprendre. L’homme est confiant et généreux… A l’image du pain des amis, recette créée à l’origine pour ses amis et qu’il partage aujourd’hui avec tout ceux qui poussent la porte.

Du Pain et Des Idées
34 rue Toudic
75010 Paris

lundi 22 décembre 2008

Du Pain et Des Idées - Boulangerie



Christophe Vasseur est de ceux, qui, à la croisée de plusieurs chemins, on trouvé la sincérité et l’authenticité de leur démarche. « Du Pain et Des Idées », sa boulangerie, allégorie de ses envies, se situe en angle de rues, comme ouverte au passage et au partage. Le partage de l’Histoire tout d’abord, puisque le lieu est classé aux monuments historiques, avec ses miroirs en biseaux et son plafond fin XIXème.
Le pain est en accord avec ce décor, tout en justesse dans le respect de la tradition boulangère. Christophe Vasseur s’évertue à nous offrir les saveurs que connaissaient nos grands-parents et arrière-grands-parents. Les farines sont biologiques ou de tradition française, la pâte est fabriquée à la main et cuite sur pierre afin d’amplifier le goût et de permettre une meilleure conservation. Christophe Vasseur a étudié les méthodes anciennes de panification. Il choisit ses produits avec soin et reste à l’écoute de la clientèle.

En ces temps brumeux, il explique à des curieux que l’humidité ne permet pas à la pâte de lever de façon aérienne, le pain est donc plus compact mais se conserve mieux. Le boulanger n’est pas avare de détails lorsqu’il parle de ce qu’il aime : le pain est une matière qui n’est pas immuable mais qui vit et se modifie en fonction de différents critères. Ainsi le pain d’un jour ne sera pas le même que celui du lendemain. Christophe Vasseur ne cherche pas à façonner le pain mais l’accompagne dans sa transformation.
Les pains, posés sur de massifs comptoirs en bois, sont dorés et bruns. Le « Pain des amis », aussi convivial que son nom, a la croûte épaisse, la mie grège et les arômes de châtaigne et de noisette. Les viennoiseries ne sont pas en reste. Joliment empilés dans des paniers en osier, les croissants sont croustillants, les pains au chocolat généreux, les chaussons aux pommes, gonflés et charnus. La brioche est parfumée à la fleur d’oranger et parsemée de petits grains de sucre. Quant aux tartes, elles sont de saison : l’hiver, la pomme trône, maîtresse, joliment arrangée sur une pâte fleurant bon le beurre.

On se sent bien dans cette boulangerie de quartier, primée par le Gault et Millau cette année.

34 rue Yves Toudic
75010 Paris
01.42.40.44.52

lundi 8 décembre 2008

Jacques Genin, Boutique de chocolats et salon de thé


Rue de Turenne, toujours, mais à l’autre extrémité. J’étais à la recherche de la fraîche et attendue boutique de Jacques Genin. Je m’inquiétais de voir la rue se terminer par une intersection sans que mes yeux ne devinent de chocolatier à l’horizon. Finalement, un rayon de soleil découvrit une façade découpée de fenêtres carrées, sortes d’écrins refermant les créations non pas d’un potentiel joaillier, mais bien de l’artisan fondeur en chocolat. La porte poussée, je découvrais un vaste espace feutré et boisé dont les tonalités naturelles offraient un accueil bienveillant.

Trois jeunes gens aimables et souriants faisaient découvrir aux clients curieux, les différents chocolats et friandises alliées. Les tables vitrées se divisaient en autant de catégories de douceurs. Ma gourmandise se porta en premier lieu sur les éclairs au chocolat, souvenir emphatique de mes plaisirs d’enfance. Mais, devant la vitrine des gâteaux, un dilemme se présenta. Huit pâtisseries s’offraient à mes yeux éblouis et le choix ne pouvait que se révéler cruel. L’éclair était sublime, le marron du chocolat, intense, presque noir, brillant. Le chou juste dans le bon ton. La tarte au chocolat, était classique, sobre et chic avec son centre doré. Le mille feuille, élégant, suggérait le croustillant de ses feuilles et révélait le moelleux d’une crème chocolatée. La couleur chaude et brune des gâteaux était symétriquement contrastée par le rouge d’une tarte à la framboise et le jaune d’une tarte au citron. Sublime ! Quant au goût… l’éclair au chocolat retrouvait enfin sa noblesse, jusqu’à présent trop souvent perdue.

Devant la vitrine des bonbons de chocolat, la jeune femme qui s’occupait de moi, me proposait le choix entre trois sortes : le Noir, Le Lait et les Pralinés… chacune de ces catégories offrait un vaste choix de ganaches, certaines aux fruits, d’autres aux herbes ou encore aux épices… Il arrive des moments où la curiosité cède parfois la place à la gourmandise. C’était précisément le cas : ce fut noir ! Noir comme l’ « Arabicadabra » avec sa ganache au chocolat noir et au café ; noir comme le « Sucre d’or » au miel de châtaignier, comme la « menthe amante » mariant délicatement la plante au chocolat ; noir, enfin, comme « le beau ténébreux »… fondant et délicat.

Alors que mon enthousiasme était à son comble, mon choix de chocolats fut délicatement déposé dans une petite boîte carrée en métal argenté, agrémentée des initiales de Jacques Génin, le malin génie du lieu. Je repartais enjouée, tenant dans mes mains gantées les anses satinées d’un sac blanc, sobre et monogrammé JG.

133 rue de Turenne
75003 Paris
01.45.77.29.01
Métro : Oberkampf/République

rencontre avec un fondeur en chocolat: jacques Genin


Ravie de déguster une truffe au chocolat, je discutais gentiment avec les trois personnes s’occupant du service de la boutique et du salon de thé du fondeur en chocolat : Jacques Genin. J’osais demander s’il était possible de rencontrer le conteur de ces lieux.
Jacques Genin accepta sans forme et sans délai, avec toute la générosité que suggère son chocolat. Je fus invitée à gravir les marches du splendide escalier en colimaçon. Au sommet, de grandes baies vitrées permettaient d’apercevoir le fameux laboratoire, dont le nom évoque bien des fantasmes à tous les curieux de cuisine. La porte ouverte, les effluves de chocolat vinrent délicieusement chatouiller mes narines ; odeur réconfortante, odeur rassurante et plaisante. Je fus accueillie par le maître des lieux qui me présenta sa charmante brigade.

L’univers du laboratoire contrastait avec l’écrin qu’incarnait la boutique-salon de thé. Mais malgré le blanc et le gris acier, la chaleur humaine était bien présente. M. Genin s’occupait à polir d’énormes tablettes de chocolat abordant l’écusson d’une grande famille. La commande qui avait été passée pour les fêtes s’exécutait joyeusement. M .Genin, m’expliqua que beaucoup de commandes provenaient de grandes maisons et de tables arborant les fameux macarons. Depuis quinze ans, Jacques Genin gardait son savoir-faire autodidacte pour les seuls professionnels des métiers de bouche. Fort de son expérience et de la confiance acquise, il décida enfin qu’il était prêt à offrir le fruit de son travail aux gourmands de la rue.

M. Genin se défend d’être artisan chocolatier et se définit comme fondeur en chocolat. Il ne fabrique pas la matière mais la travaille. La couverture est fournie exclusivement par la maison Valhrona, dont la valeur gustative n’a pas d’égal aux yeux de cet artisan. Les grains grossiers sont alors fondus dans le laboratoire afin de se transformer en produits fins. La couverture est travaillée selon les inspirations soufflées par les épices, plantes et fèves que M. Genin fait infuser. Le résultat est épatant tant l’alliance est harmonieuse et équilibrée. Les saveurs se respectent en s’orchestrant parfaitement. Le goût du chocolat, fortement suggéré par le bonbon en lui-même, laisse apparaître délicatement la particularité des ingrédients cachés. Le plaisir est alors doublé par la devinette de la composition. La longueur en bouche permet de rechercher en toute quiétude les différentes subtilités. Le chocolat est à la fois fort et tendre… sensuel ! Jacques Genin parle avec plaisir de son travail sans cesse en mouvement.

Si l’homme cache sa timidité, sa présence certaine se dévoile au cours de la discussion. Ayant commencé il y a vingt-cinq en cuisine, Jacques Genin continue le travail des recettes en réalisant également des pâtisseries. A l’image de l’immense salle du bas, le choix des pièces s’est fait avant tout dans la recherche de l’authenticité du goût. Les gâteaux sont sobres, gracieux et d’une véritable finesse. Jacques Genin est un véritable amoureux qui respecte la nature des saveurs et ne cherche qu’à les révéler. L’homme est heureux d’apprendre que son travail est apprécié alors que la preuve n’est plus à apporter. C’est cette même humilité que l’on retrouve dans les douceurs servies avec beaucoup de délicatesse et de gentillesse.

133 rue de Turenne
75003 Paris
01.45.77.29.01
Métro : Oberkampf/République